Rien de grave

Publié le par Camille la It Girl



Tu t’attendais à quoi ? je lui ai dit. Tu crois que ça va être facile de me quitter ? Tu crois que je vais te laisser faire comme ça ? J’ai lancé le cadre par terre, le verre s’est brisé mais comme c’était pas assez j’ai bondi du lit et j’ai déchiré la photo, celle qu’il prétendait tant aimer, la photo de nous deux en mariés, beaux et légèrement ridicules, il y avait tant de monde qu’on ne connaissait pas à notre mariage qu’on est partis avant la fin.
Il a eu l’air triste, plus de la photo déchirée que du fait de me quitter. Il a toujours été fou avec les photos. Parfois je me disais qu’il n’aimait les choses de la vie que pour les voir un jour en photo. Moi c’est le contraire, rien ne me fait plus peur qu’une photo, rien ne me semble plus faux-cul qu’une belle photo de bonheur avec toute la quantité de malheur qu’elle promet, qu’elle contient, mais sans le dire, en cachant bien son jeu. Je ne savais pas encore que c’était la meilleure chose qui puisse m’arriver, qu’il me quitte. Comment j’aurais pu le savoir ? Il était toute ma vie, sans lui je n’existais pas.
Il portait des baskets neuves, ce soir-là. Il était allongé sur le lit, ses baskets neuves aux pieds. D’abord j’ai cru que c’était parce qu’il en était content, parce qu’il voulait les admirer et me les faire admirer, je ne savais pas que c’était pour partir, en courant, pour toujours. Pourquoi tu n’enlèves pas tes baskets ? j’ai demandé. Elles sont chouettes, mais il est deux heures du matin, t’as envie de faire l’amour avec tes baskets mon amour ? Non, il a dit, sans rire ni sourire, non, j’ai pas envie de faire l’amour avec mes baskets, j’ai quelque chose à te dire. Ah bon, quoi ? Je me suis pelotonnée contre lui. En rentrant de mon bureau, je l’avais appelé : tu as besoin de quelque chose ? Non. Du fromage, des Frosties ? Non. Parce que je vais aller faire des courses, il n’y a plus de Coca, ni de thé je crois, tu veux sûrement quelque chose ? Rien. Rien, t’es sûr, c’est dommage, car je voudrais bien te faire plaisir, moi. Alors, fais-moi plaisir, ne me rapporte rien s’il te plaît. Cette conversation m’avait sidérée. Il ne disait jamais non aux Frosties, d’habitude. Jamais non au fromage. Parfois on se levait la nuit, moi pour aller boire un verre de lait, lui pour se faire un sandwich, on se retrouvait dans la cuisine, ensommeillés, affamés, c’était parmi les moments que je préférais, quand il était décoiffé, tout nu dans le froid, France Info à fond pour écouter le résumé du match de foot. Mais là il ne voulait pas de fromage, rien, c’était la première fois, c’était bizarre.
Tu te souviens comme on se moquait, d’habitude, de ceux qui disent bon il faut qu’on se parle ? il m’a dit, couché sur le lit, ses baskets neuves aux pieds. Oui, pourquoi ? Parce qu’il faut qu’on se parle, là, c’est idiot mais il faut qu’on se parle. Il avait le menton qui tremblait, il avait l’air qu’il a quand il a une sale note, ou quand il s’est disputé avec son père, ou… Non, en fait, il n’a jamais eu le menton qui tremble comme ça, il n’a jamais eu cet air-là, et je lui demande, tout bas, au bord des larmes, en osant à peine poser la question, en n’osant pas entendre la réponse : il faut qu’on se parle, mais de quoi ? Et, comme il hésite : allez, allez, dis-le, je crie, debout soudain près de lui. Je viens de comprendre, en fait, et je le déteste d’avoir compris : dis-le ! dis-le ! La semaine dernière… (il tousse, il prend une cigarette, cherche du feu, n’en trouve pas, repose la cigarette)… la semaine dernière, tu portais ta robe verte, tu sais, celle qui fait se retourner les gens dans la rue et qui me rend toujours si fier, tu m’as dit ça y est, je suis guérie, je vais bien, je vais tellement bien qu’on va pouvoir enfin s’aimer bien, je n’ai plus peur que tu me quittes, tu t’en souviens ? Bien sûr que je m’en souviens, je pense : je me sentais si forte, ce jour-là, j’avais arrêté les amphètes depuis un an, je ne lisais plus son journal intime, je ne parlais plus en dormant, et c’est vrai que je n’avais plus peur qu’il me quitte, et c’est vrai que c’était une drôle de bonne nouvelle, ça voulait dire que la vie allait être plus légère, c’est tellement important la légèreté. Je ne réponds pas, pourtant. Je suis trop atterrée par ce que je suis en train de comprendre et c’est lui qui reprend : eh bien je pars, voilà, je m’en vais, c’est ça le truc que je voulais te dire.


Rien de grave, c'est l'histoire de Louise qui a beaucoup aimé Adrien qui est parti comme ça un matin vivre sa vie avec une mannequin très célèbre avant qu'elle ne soit devenue on sait qui. Mais en fait, on se fiche bien de qui elle est, de qui il est, et on se fiche encore plus de La première dam. Ca ne change rien à ses très jolies premières chansons.

J'ai lu ce livre il y ... pfiou... 5 ans je crois. quand c'est sorti. Si j'avais eu un blog à cette époque, j'en aurai sans doute parlé parce que c'est vraiment très bien.

Rien de grave, c'est l'histoire d'une fille qui pourait faire la fête toute la journée et toute la nuit, mais ce n'est pas son genre. Elle raconte la tristesse, les gens qui comprennent, les gens qui ne comprennent pas, Patrick Mille, les pâtes au thon, les rencontres, les somnifères, les premiers romans, les jours de bonheur et tout le reste.

je trouvais qu'elle faisait trop la coquette, elle était avec son père mais je l'avais vue, à la plage, au café, à table, faire l'intéressante et l'innocente, minauder, draguer tous les hommes du paysage, oh comme vous êtes passionnant, ah comme vous êtes séduisant, je la trouvais belle et dangereuse avec ce visage immobile, comme sculpté dans la cire, quand elle souriait elle avait une sorte de déplacement des os qui découvraient ses dents, toutes pareilles, taillées pareilles, je la trouvais belle et bionique, avec un regard de tueuse.”
“Quand j'avais quinze ans elle était déjà mannequin, j'étais fascinée par ce visage parfait, après j'ai appris qu'il était faux, qu'elle l'avait choisi sur un ordinateur avec son chirurgien, alors voilà, on va vous faire des pommettes hautes, comme ça, en silicone, on va raccourcir le nez et rajouter un peu de menton pour l'équilibre du profil, très bien les yeux, rien à changer pour les yeux, mais on peut opérer une très légère incision sur les tempes histoire de rehausser la ligne du sourcil, qu'en pensez-vous, quelques injections de Botox pour glacer l'ensemble, pour les .. vous verrez avec mon collègue

S'il vous reste du pouvoir d'achat et même encore un peu plus

Son premier roman, déjà autobiographique sur son enfance et son adolescence : Le Rendez-vous


Publié dans Le livre DOP

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L
ça marche ! ;)<br /> <br /> Merci !!
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L
Ecoute si tu le retrouves je veux bien que tu me le prêtes, oui ! :) <br /> Mais si tu n'arrives pas à mettre la main dessus, je l'achèterai sans souci !<br /> <br /> Merci en tout cas !!
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C
<br /> je regarderai alors dés que je rentre si tu n'es pas préssée, je peux te le filer la semaine prochaine ( apres le 10 janvier)<br /> <br /> <br />
L
Je l'ai lu y a un moment, je l'avais trouvé en poche dans un Monoprix, mais c'est marrant, dans mon souvenir c'était il y a bien plus longtemps que 4 ans ... Je n'en avais pas du tout entendu parler, je suis tombée dessus par hasard, et j'ai été complètement séduite ... Le style était tellement fluide, tellement à vif, tellement joli ... Et puis oui, ce n'était "que" l'histoire d'une énième rupture, d'un énième chagrin d'amour, mais cela m'a touché, m'a submergé même, et a retenti longtemps en moa. <br /> <br /> Bref, j'ai adoré ce livre, et le style de l'auteur est vraiment agréable à lire selon moa. Et puis j'avais passé "le rendez-vous" en caisse il y a quelques temps et je m'étais dit que je l'achèterais, mais ça m'était sorti de la tête, grâce à toi je vais le rajouter dans ma liste de livres à acheter absolument ! :) Merci Camille !!<br /> <br /> Des Bises !!
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C
<br /> je peux te le préter si tu veux, je crois que je l'ai en double parce que j'avais trouvé une édition reliée à 1 euros dans une bourse aux livres, mais il faut que je le retrouve et ça c'est pas<br /> gagné du tout!!!<br /> <br /> C'est dingue, je ne pensais pas qu'autant de monde l'avait lu, je suis bien contente d'ailleurs!!!<br /> <br /> <br />
C
Il est vraiment sympa ce livre, un peu vieux maintenant, mais vraiment bien...
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C
<br /> oh pas si vieux que ça comparé à l'Enéide :D<br /> <br /> <br />
C
Pas être fatalement très original, mais ceci dit : I loooove this book. <br /> (vraiment vraiment)<br /> (je ne peux pas vraiment expliquer pourquoi; juste peut-être qu'elle réussit à le faire lire sans qu'on pense aux personnages, et qu'on soit pris dans le fil, d'une traite)<br /> <br /> <br /> Noyeuse année!
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C
<br /> exactement, je pensais pas du tout à "eux" en le lisant, d'ailleurs ca n'avait pas du tout changé ma perception des différents protagonistes IRL, je crois que j'en veux bcp plus à Carla de s'être<br /> mariée avec Notre Président en fait :D<br /> <br /> <br />